2020- SUMAC KAWSAY

MARIA IBANEZ LAGO

Maria Ibanez Lago travaille sur la matérialité de l’image et son rapport aux objets, pour évoquer une dramaturgie. La peinture est regardée dans son contexte historique et le curseur du format est poussé jusqu’aux limites qui la définissent, visant sa transformation en objet, en sculpture.

Le concept d’énergie est pris dans son aspect matériel et ses usages économiques, mais aussi dans sa
signification mystique et corporelle, dans une superposition de concepts et de représentations.
Les perturbations et l’usage abusif de cette énergie, en lien à l’exploitation des ressources naturelles, à leur schéma économique et à leur rôle dans le changement climatique sont dénoncés et les œuvres prennent une signification politique.

Le monde végétal est envisagé comme un réservoir d’énergie, en lien à l’alimentation, l’alchimie de la photosynthèse, et le pouvoir de guérison. Les plantes sont contemplées sous le filtre nostalgique de leur disparition et envisagées comme éléments de construction de la mémoire.

Les pièces ici présentes font partie d’un projet en cours : Aldiss, prototypage d’espèces végétales.
Aldiss est un laboratoire de production de maquettes pour étudier différentes formes de croissance
végétale. C’est un travail de modélisation géométrique avec des matériaux simples, conçus comme une extension de la peinture. Dans Aldiss on cherche des formes de nouvelles espèces pour leur adaptation
à une réalité possible, construisant une utopie avec les restes de ruines futures.

BIANCA LEE VASQUEZ

Son approche multidisciplinaire recoupe la performance, la photographie, la sculpture et l’installation pour révéler les interactions contemplatives entre le corps et la parole naturelle.
La pratique de Bianca Lee Vasquez étant très orientée sur le rituel, elle tisse des toiles entre la flore, la
corporéité et l’inconscient pour favoriser l’établissement de liens avec la terre. Elle met en corrélation les expériences retrouvées de ces interventions dans la nature avec ses installations performatives ou ses
sculptures tout en se mêlant à divers thèmes écologiques, féminins, inconscients et spirituels.
Bianca Lee Vasquez a d’abord développé une série de dessins épineux et linéaires réalisés à partir de plantes endémiques d’Amérique latine avec des organes de défense en forme de flèche pointue, puis les a réalisés en deux et trois dimensions. Une pièce de textile tissé fabriquée à la Toile de Tours et des sculptures en argile cuite utilisant la terre qu’elle a recueillie lors de sa visite sur le site sacré de Yagul, au Mexique.

Parmi ses œuvres exposées dans l’édition 2020 de Dedans-Dehors figurent des textiles et des terres cuites qui examinent les formes littérales et figuratives du moment exotique actuel, permettant une réflexion sur le cataclysme du présent, comme une sorte de deuil divinatoire.
Ces formes épineuses rappellent l’utilisation ancienne des épines d’agaves dans le rituel précolombien et s’inspirent également de la figure sculptée de Vénus de Laussel, datant du paléolithique, trouvée en
Aquitaine, dans la même région que l’actuelle exposition Dedans-Dehors. Dans son travail, elle continue à créer un dialogue entre les cultures, entre les peuples et entre les époques, qu’elles soient préhistoriques ou modernes.

CONSTANZA PIAGGIO

La série de photographies « Solipsisme » de Constanza Piaggio, se réfère à l’idée métaphysique selon laquelle il n’y aurait pour le sujet pensant d’autre réalité acquise avec certitude, que lui-même. Par une série d’actions menées au coeur de son propre environnement, l’artiste explore cette prétendue réalité inaccessible comme faisant partie d’un état d’esprit créé par soi-même. L’objectif devient une ramification de son corps. Le point de vue reste subjectif, il est conditionné par cette extension de son bras. Les fleurs figurent ce monde que l’artiste veut vérifier et tester par des gestes précis et suggestifs.

À l’entrée du château de La Caze, Constanza Piaggio présente une série de huit photographies dans lesquelles sa main entre en contact avec un ensemble de fleurs qui pourraient provenir du jardin à la française du château. Les couleurs saturées des images instillent la forte lumière du soleil. Le « toucher » de sa main révèle la sensualité présente dans le végétal et suggère la connexion que l’artiste essaie de créer avec chacune des fleurs.

Dans le salon de musique et dans la salle de réception, les œuvres “Pivoine Duchesse de Nemours “et “Chrysanthème Anastasia”, utilisant les moulures tel un cadre, sont insérées dans le relief des cheminées. Les images sont imprimées sur papier peint. Leur lumière diaphane presque immatérielle nous transporte en parfaite harmonie avec l’environnement, dans son monde intérieur. Le point de vue auto-référentiel est conservé, même si ce n’est plus son bras mais d’autres parties de son corps qui entrent en contact avec les fleurs. L’échelle augmentée du corps crée une forte sensualité en symbiose avec le classicisme de l’architecture. Autre pièce présentée dans le salon de musique, la photographie “Rose de Castille” est contenue dans un cadre du XIXe siècle de la collection du Château de La Caze. La référence picturale convoquée par ce type d’encadrement, contraste fortement avec la contemporanéité de l’image.

CHANTAL RAGUET

Pour l’exposition d’été 2020 à La Caze, j’ai sélectionné une dizaine d’œuvres et séries qui me semblaient pouvoir rentrer en dialogue avec les lieux.

Pour Le Grand Fakir dans le Salon de musique, je me suis basée sur la couleur des boiseries et la
présence des deux horloges. Le coussin rond est lui aussi composé de cadrans de montres anciennes, brodés face contre émail sur velours bleu clair.

Ensuite j’ai privilégié des salles privées du bâtiment, comme l’antichambre où la présence des têtes de lion aux angles du grand billard a eu un écho retentissant avec mon New French Fauvism, mouvement qui redéfinit la figure du fauve d’un point de vue ornemental, textile, martial ou encore circassien.
Aussi peut-on trouver au dessus de la cheminée un portrait d’Hugh Hefner sur un sofa tigré, des aquarelles d’avions de chasse repeints par leurs pilotes, des roues/cocardes crochetées aux écussons guerriers et deux roseaux aux proportions proches de celles des queues de billard.

On finit l’exploration de cette aile du château avec le lustre Cages Cascade, un rappel des lustres Louis XVI mais où les cristaux d’antan ont laissé place à une cascade de chaînes aux maillons dorés. Les ombres balancées sur les parois de la pièce nous renvoient à certains moments de pandémie traversés récemment durant lesquels la situation d’enfermement, de confinement ou d’emprisonnement a été par chacun éprouvée. Être Dedans sans pouvoir aller Dehors !

Chantal Raguet, juillet 2020